• Carnets de notes, matière à faire un livre

    Un journal, ne serait-ce que dans sa forme la plus ordinaire, c'est le moyen d'entretenir avec l'écriture des rapports intimes et nourriciers. Je n'écris plus de roman. Je souffre de ce manque. La poésie ne parvient pas à me satisfaire dans la mesure où la forme prend le pas sur le fond. Cette micro-création littéraire me fait l'effet d’ânonner ce qu'il me tient à cœur d'exprimer. Petite littérature fragmentée, joliment arrangée sur la page, ne me fait pas l'effet d'un texte solidement construit autour d'un personnage auquel je m'identifie. Le "je" littéraire s'y résorbe. Et j'ai besoin d'espace, et j'ai besoin de temps.
    Le temps. Facteur essentiel de l'écriture romanesque. Depuis que je travaille à temps plein, ou peu s'en faut, je manque effectivement du temps nécessaire à l'élaboration d'un ouvrage de longue haleine. Mais le manque de temps n'est pas le seul responsable. Depuis des années je ne terminais plus mes romans. C'est là quelque chose qui me préoccupe, et j'espère de tout mon cœur pouvoir, à nouveau, écrire un roman, écrire des romans. L'heure de la retraite étant bien loin de sonner, il va falloir que je pense très sérieusement à aménager mon temps libre afin de me donner les moyens de réaliser mon projet.
    Je dois travailler à renforcer mon identité secrète et créatrice, celle-là même qui me permettait de m'isoler de monde, des jours et des semaines durant, pour mener à terme des textes longs de plusieurs centaines de pages. Je ne peux plus guère m'isoler, puisque j'ai un métier. Mais il vaudrait mieux à mon sens exploiter mon temps libre à "fabriquer un livre" qu'à me torturer mentalement. La vie étant ce qu'elle est. N'y aurait-t-il pas là justement de bonnes raisons d'inventer ma vie, de revivre mes vies parallèles, et d'avoir dans les yeux ce qui faisait dire aux gens, voilà quelques années de cela : "toi, tu es en train d'écrire, ça se voit".

     

    Ci-dessus quelques notes que j'ai prises assez récement. Cette retraite, ou si vous préférez mon retrait des blogs durant une petite quinzaine, m'aura permis de revenir à des choses essentielles, entendez bien sûr : des choses essentielles pour moi. L'écriture en l'occurrrence. Je ne perds pas de vue que le tout premier de mes blogs avait pour vocation d'être un blog littéraire, vocation qui ne s'est guère démentie jusque là, malgré de nombreuses excursions du côté de la photographie qui reste un moyen d'expression alternatif, quand l'écriture se fait rare au bout de mes doigts. L'écriture, à ce jour, reste ma principale raison de vivre ; j'ai peu de temps devant moi pour satisfaire à mon besoin d'écrire ; vous comprendrez mieux que je n'ai pas de temps à perdre à essuyer, éponger, et digérer, les commentaires médiocres du style "tu t'es pas cassé la tête pour donner un nom à ton chat". Passez votre chemin si vous n'avez rien à me dire de plus sympathique et de plus enrichissant.

     

    Depuis deux ans je tiens le journal abrégé de mes journées au travail. Pendant ces quelques jours où je ne faisais pas acte de présence sur les blogs, j'ai mis ces notes à jour et je les ai consignées dans des petits carnets noirs achetés tout exprès pour l'occasion. J'éprouve beaucoup de joie et de soulagement à l'idée que ces notes ne seront ni perdues ni oubliées, car elles vont me servir à l'élaboration d'un ouvrage qui paraîtra dans quelques années sous un autre nom que celui de Thaddée Sylvant.

     

    Parallèlement à ce travail de "mise au propre", j'ai remis la main sur un livre que je tiens de mon père, ou plutôt que maman m'a transmis après le décès de mon père en 2004. Il s'agit de Pétain mon prisonnier écrit par Joseph Simon.

     

    Je crois que rien n'arrive au hasard, et qu'un fil rouge guide tous nos gestes aux fins d'assembler les pièces jusqu'alors éparses d'un puzzle. Pour moi, ce livre agit comme un véritable révélateur, dans le sens où certains passages du préambule m'éclairent sur la façon de procéder vis-à-vis des notes que je collecte depuis maintenant deux ans, mais qui font référence à cinq annés vécues dans l'intimité des gens que je côtoie au quotidien.

     

    Le but de ce travail littéraire de longue haleine entrepris au mois d'octobre 2011 est de livrer au final un autentique mémorial, un ensemble brut sans fioritures ni arrangements. Mon souci premier : ne pas intellectualiser ce que j'entends tous les jours de la bouche des autres car je souhaite avant tout restituer son authenticité, quand bien même cette authenticité flirterait avec l'absurde. Je m'attache très simplement, lors de la transciption, à procéder à quelques modifications nécessaires pour plus de compréhension. On pourra m'objecter que, par la force des choses et par le jeu de l'écriture, le seul fait de transcrire ce que j'entends revient à traduire les gens en Thaddée Sylvant. Mais je peux affirmer sans la moindre hésitation que l'état d'esprit de ces personnes sera respecté jusque dans la moindre virgule, le moindre point d'exclamation.

     

    J'ai du pain sur la planche. L'objectif étant de donner, avec méthode et rigueur, à ces notes décousues et non encore classées, la forme plus achevée et l'apparence plus robuste d'un ouvrage de librairie. Entendons bien par là que ces carnets manuscrits sont "matière à" ; ils ne représentent en rien un aboutissement en soi.

     

    Le problème, maintenant, étant de contourner la question cruciale de la vie privée de ces gens. Et là j'ai relevé dans le livre dont je vous palais à l'instant, Pétain mon prisonnier, des tas de passages faisant référence à ce problème.

     

    ... lié par le secret professionnel : cette obligation de réserve est de règle chez ... Il est une tradition du silence chez ...

     

    Il va falloir jouer serré avec ce respect de confidentialité. Parce que la liberté d'expression n'est pas tout, quand elle se heurte à des secrets de famille et des maladies mentales. Comme on dit : "tu es libre de tout faire tant que tu n'empiètes pas sur la vie privée des autres" ou encore : "ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse à toi".

    « Je vais (presque) bien, et vous ?A très vite sur vos blogs »

  • Commentaires

    1
    Dimanche 15 Septembre 2013 à 12:13
    Anne-Marie(Mistic)

    Bonjour ma Thaddée,

    Quiel plaisir de te voir prise par ce beau projet bien difficile il est vrai puisqu'il doit répondre aux exigences que tu évoques :authenticité sans fioritures, respect de la vie privée, entre autres !

    je te souhaite du fond du coeur d'y parvenir, sûre que tiu nous livreras un jour une oeuvre aussi magistrale que "Fragments d'une vie brisée", même si c'est dans un style totalement différent ! Sûre aussi que nous y retrouverons ta qualité de plume inimitable !

    Courage, mon amie ! Courage !

    Je t'embrasse aussi fort que DGAR ! Des caresses toutes douces à l'intépide Félixou ! Et continue à prendre soin de toi, hein !

    2
    Dimanche 15 Septembre 2013 à 13:36
    fanfanchatblanc

    Bonjour Thaddée.

    Un touchant monologue qui nous permet de lire dans tes pensées. Continue à mettre en oeuvre ce beau projet littéraire. Je n'ai aucun doute sur ta capacité à le faire naître -il faut juste que tu chasses de ta tête les désagréments que t'ont causé les malfaisants qui traînent sur les blogs avec de vilaines intentions-

    Je te souhaite un bon dimanche et je t'embrasse

    3
    Dimanche 15 Septembre 2013 à 16:23
    minouche89130

    Bonjour ma chère Thaddée moi aussi j'étais contente de t'entendre et si modestement je t'ai un peu redonné envie de bloguer avec tes amis je suis trés contente.
    Pour ce livre authentique et respectueux de la vie privée que tu t'apprêtes à écrire je suis sûre moi que tu y arriveras et que cela te permettra comme dit Fanfan d'éloigner un peu tout ce qui te fait mal et qui gravite autour de toi de bien mauvaise façon!
    Penses un peu plus à toi ma chère amie et j'espère que nous t'aiderons à notre façon dans les jours un peu plus noirs.
    Gros gros bisous du coeur. Minouche 

    4
    Dimanche 15 Septembre 2013 à 17:36
    flipperine

    tu vas te lancer dans un lourd travail et ce n'est pas évident comme tu dis de ne pas empiéter sur la vie privée des gens

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